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Des congés de paternité scandinaves en Belgique : c’est possible !

Bruxelles, 14 décembre 2016. Le Groupe du Vendredi, un groupe de réflexion de jeunes soutenu par la Fondation Roi Baudouin, a développé une réforme du congé parental qui permettrait aux pères et coparents de prendre 3 mois de congé de paternité à 1400 euros par mois au cours de la première année de vie d’un enfant. Selon leurs calculs, cette réforme coûterait à la sécurité sociale 49 millions d’euros qui pourraient être trouvés dans une refonte solide du quotient conjugal, un système très peu favorable à l’égalité de genre. Les détails sont à lire dans son rapport intitulé ‘Time’s up : vers une gestion plus égalitaire du temps entre les hommes et les femmes via une réforme du congé parental’, qui paraît aujourd’hui.

Le temps est l’élément ‘égalisateur’ universel : chacun dispose de 24 heures dans une journée. Mais la façon dont les hommes et les femmes utilisent ces heures est très différente. Les femmes effectuent en effet une heure et demie de travail non rémunéré en plus par jour que les hommes. Sur une année, les femmes totalisent ainsi plus de 2 mois de travail non rémunéré ! Nathalie François, co-auteur et experte en droit public : « Cet emploi du temps inégal est selon nous en partie la cause de la sous-représentation des femmes dans des fonctions dirigeantes et dans le débat public. D’autre part, 3 hommes sur 4 aimeraient passer plus de temps avec leurs enfants, mais la politique actuelle dans ce domaine offre encore trop peu de chances aux jeunes pères de le faire ».

« Une réforme du congé de paternité et du congé parental permettrait d’offrir plus d’opportunités et de liberté aux familles : les femmes pourraient choisir de consacrer ainsi plus de temps à leur carrière, et les hommes à leur famille », ajoute la Norvégienne Marika Andersen, initiatrice d’EUPanelWatch, qui a soutenu la rédaction du rapport. « Des études démontrent en effet que les pères qui ont pris un congé de paternité assument en général plus de tâches domestiques tout au long du reste de leur vie, et que les mères travaillent plus à l’extérieur et gagnent plus d’argent. L’inégalité de temps entre hommes et femmes est rectifiée. En Scandinavie, d’où je viens, les hommes peuvent de manière générale rester entre 10 semaines et 1 an à la maison après la naissance d’un enfant, tout en étant payés, et assument une plus grande part des tâches domestiques. ».

Le Groupe du Vendredi a dès lors imaginé une réforme concrète, chiffrée et financée, du congé de paternité et du congé parental. Brieuc Van Damme, président du Groupe du Vendredi et expert en matière de sécurité sociale : « Payez aux pères et coparents les 10 jours de congé de paternité à 100% au lieu de seulement les 3 premiers jours comme c’est le cas actuellement, et offrez-leur en plus l’occasion d’échanger leurs 4 mois de congé parental à 700 euros par mois contre 2,5 mois de congé de paternité à 1400 euros par mois. La seule condition étant qu’ils devraient prendre ces 2,5 mois au cours de la première année de vie de l’enfant. Les pères et coparents pourraient ainsi prendre 3 mois de congé parental pour apprendre à s’occuper de leur bébé (une compétence qui aura de l’importance pour le reste de la vie de la famille), tout en gagnant 700 euros nets en plus ».

Le Groupe du Vendredi a calculé que cette réforme coûterait 49 millions d’euros à la sécurité sociale, et propose de la financer par le biais d’une refonte approfondie du quotient conjugal, un système très peu favorable à l’égalité de genre et véritable piège à l’emploi, qui coûte actuellement plus de 600 millions d’euros au fisc. Les auteurs proposent dans la foulée une série d’autres recommandations pour remédier à la sous-représentation des femmes dans des fonctions dirigeantes et dans le débat public, notamment l’imposition de quotas temporaires, par exemple dans les conseils d’administration. Le cadre ci-dessous reprend 10 recommandations concrètes. Les calculs figurent dans le rapport et dans les tableaux qui peuvent être consultés gratuitement ici.

10 recommandations concrètes pour une gestion du temps égalitaire entre hommes et femmes

  1. Rémunérer les 10 premiers jours du congé de paternité ou coparental à 100% si le père ou coparent prend effectivement la totalité de ces 10 jours (et pas uniquement les 3 premiers jours à 100% comme c’est le cas actuellement).
  2. Rémunérer les 10 premiers jours du congé de maternité à 100%, et non à 82% comme c’est le cas actuellement.
  3. Prévoir la possibilité pour les pères et coparents de doubler le montant de leur congé parental pendant 2,5 mois à 1400 euros / mois s’ils le prennent endéans l’année de naissance de l’enfant. On offre ainsi aux pères et coparents belges la possibilité de prendre 3 mois de congé de paternité pour la naissance d’un enfant, tout en permettant à la famille de toucher 700 euros nets en plus.
  4. Étudier le lien entre l’inégalité de temps et la surreprésentation des femmes dans les congés de maladie, afin d’aligner au mieux la politique en la matière.
  5. La gestion du budget et de la réglementation du congé parental doivent passer de l’ONEM à l’INAMI qui gère déjà les congés de maternité et de paternité ou coparental, de manière à autoriser une politique plus cohérente et plus efficace.
  6. Ramener le taux de TVA sur les produits d’hygiène des femmes de 21% à 6%, le tarif appliqué à d’autres produits de base.
  7. Procéder à une étude et réformer en profondeur le quotient conjugal (et d’autres politiques fiscales peu favorables à l’égalité de genre) qui encourage fiscalement une situation où la femme travaille peu ou ne travaille pas du tout. Le quotient conjugal coûte aujourd’hui plus de 600 millions d’euros et peut financer le coût estimé à 49 millions d’euros pour les recommandations 1, 2 et 3, ainsi que le coût supplémentaire de la réforme nécessaire de la TVA (recommandation 6).
  8. Il est nécessaire de mettre en place des quotas temporaires pour les femmes, par exemple dans les conseils d’administration, et créer de la sorte des exemples.
  9. L’enseignement doit combattre de manière plus proactive les stéréotypes liés au genre.
  10. Une task-force variée, composée de spécialistes du marché de l’emploi, d’économistes, de sociologues et de juristes, doit objectiver l’écart salarial entre hommes et femmes et présenter des solutions pour le combler.