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Octroi de permis comme arme de compétitivité

La rapidité des processus d’octroi de permis en tout genre pour des projets liés à la transition écologique est un élément de compétitivité important entre pays et continents. Outre les éléments financiers, l’IRA aux Etats-Unis a rendu ces processus extrêmement fluides. A la Belgique et l’Europe d’y répondre, par souci de compétitivité et pour atteindre nos objectifs climatiques.

La compétitivité européenne a été mise à rude épreuve en 2022 pour deux raisons externes à nos frontières. Les Américains ont sorti le bazooka financier avec l’Inflation Reduction Act (IRA) alors que les Russes ont sorti les chars en Ukraine. Résultat : une explosion des coûts énergétiques en Europe concomitamment à des aides publiques gigantesques aux Etats-Unis.

Les 400 milliards de dollars prévus par l’IRA pour stimuler la transition écologique sur le sol américain ont déjà fait couler beaucoup d’encre, en particulier concernant les mesures protectionnistes (comme la prime de 7.500 dollar pour un véhicule électrique neuf s’il est fabriqué en Amérique du Nord). Les conséquences sont déjà visibles. Des constructeurs comme VW, et leurs nombreux fournisseurs (dont Umicore), ont annoncé des ouvertures d’usines sur le sol nord-américain plutôt qu’en Europe.

IRA et rapidité d’exécution pour les permis

Un aspect moins discuté de l’IRA est sa réforme des processus d’obtention des permis en tout genre dans le cadre de projets d’infrastructure – pourtant tout aussi capital pour la compétitivité, et la transition écologique en général. Il suffira dorénavant de quelques mois (!) avant de poser la première pierre d’un projet sur le sol américain.

L’Europe et la Belgique (la compétence est émiettée) se doivent d’y répondre afin d’éviter l’uppercut compétitif fatal, mais surtout aussi pour atteindre l’objectif de 45% d'énergies renouvelables en 2030 dans l’Union européenne. Et c’est urgent. WindEurope estime que près de 80 GW de capacité éolienne sont actuellement bloqués pour absence de permis en Europe (cinq fois la capacité éolienne installée en 2021).

Permis comme arme compétitive

Une telle réforme en Belgique (les Régions sont grandement compétentes) est très technique et sans doute peu attirante électoralement, mais n’exige pas de fonds publics et serait ô combien nécessaire. Par ailleurs, autant ne pas réinviter la roue et s’inspirer d’autres pays européens qui nous ont devancé dans la démarche.

Par exemple, en Espagne, le gouvernement teste actuellement "la règle du silence positif" selon laquelle un permis pour des projets de panneaux solaires photovoltaïques de moins de 150 MW ou de parcs éoliens de moins de 75 MW est accordé si aucune objection n'est formulée endéans les deux mois de la demande. Les experts estiment qu’une telle règle économise en moyenne 2 ans sur un délai de développement de 4 ans pour les projets solaires.

Autre exemple - au Danemark, un guichet unique existe pour les permis éoliens offshore. Cette approche a permis un processus d'obtention de permis plus efficace et a fait du Danemark un leader mondial de l’éoliens offshore.

Ces exemples montrent qu’il faut avancer des deux côtés en Belgique : une administration qui répond plus rapidement et des délais de contestation judiciaire plus courts.

Le cap a été fixé

Le gouvernement fédéral a récemment approuvé un avant-projet de loi visant à réduire à 18 mois maximum le délai de traitement des procédures au fond auprès du Conseil d'État (tout en y renforçant la main d’œuvre). Du côté européen, le Net Zero Industry Act proposé par la Commission le 16 mars dernier comprend également un volet visant à outrepasser certaines réglementations d’obtention de permis pour accélérer les projets stratégiques. On ne peut que s’en réjouir.

Ceci doit servir d’élan pour repenser et alléger les processus administratifs afin de gagner en compétitivité, de la gigafactory à construire à la maison familiale à isoler. C’est essentiel pour réindustrialiser nos régions et pour atteindre nos objectifs climatiques. Et ça ne requiert pas nécessairement beaucoup de fonds tout en attirant en Belgique des investissements importants.

Cet article a publié sur L'echo.be le 29/3/2023