Au-delà de la gouvernance, la compétence ?
Ça y’est, tout est quasi réglé ! De nouvelles majorités sont en passe d’être formées et la bonne gouvernance, nouvelle vertu subitement promue urbi et orbi, va être gravée dans le marbre de nouveaux décrets. Les élus sont les mêmes mais ils se drapent de nouveaux habits … plus blancs que blancs. Aucun n’est capable d’en définir les contours exacts mais la bonne gouvernance est le nouveau dogme derrière lequel tous les partis se rangent unanimement. Et c’est très bien. Enfin.
La Belgique et ses entités fédérées sont-elles pour autant assurées de repartir sur une trajectoire vertueuse ? Sommes-nous pour autant rassurés qu’une vision politique cohérente de long-terme sera articulée sur les vrais défis de demain : assurer la transition énergétique, résoudre les problèmes de mobilité à Bruxelles et en Wallonie, résorber le déficit structurel de nos entités fédérées, adapter nos sociétés au vieillissement, réinventer un modèle éducatif en phase avec les enjeux de notre temps… ? Rien n’est moins certain.
Bien que squattant l’intégralité du paysage médiatique depuis quasi un an, la bonne gouvernance n’est qu’une condition nécessaire mais pas suffisante au redressement de notre société. C’est un socle indispensable sur lequel on peut venir construire des projets de long terme, ce sont les fondations d’un édifice que devrait/pourrait être notre société de demain. Mais quand on a les fondations, on n’a encore rien. On ne peut que se réjouir des nouvelles règles de gouvernance à venir mais le boulot pour réenchanter la société belge ne fait que commencer.
Ce qui vaut en politique vaut dans le monde de l’entreprise. Avoir une bonne gouvernance est nécessaire à un fonctionnement sain de l’entreprise mais n’est pas suffisant pour assurer sa performance et sa pérennité. Avoir un bon conseil d’administration et des instances bien huilées ne remplacera jamais la nécessité d’avoir un CEO visionnaire, des cadres motivés et un personnel compétent.
On en arrive donc à la question de la compétence. Car au-delà des problèmes de gouvernance (conflits d’intérêt, rémunérations injustifiées, etc) le cirque politique des dernières semaines peut aussi laisser perplexe sur les compétences de certains acteurs. Ne pas faire de PV de réunion de conseil d’administration, comme ce fut le cas au SamuSocial, est autant un problème de gouvernance que d’amateurisme et de manque de compétences de base en gestion. Payer correctement ses cotisations ONSS, comme ce ne fut pas le cas à l’ISPPC, est une question de respect de ses obligations d’employeur avant d’être une question de bonne gouvernance. Beaucoup d’erreurs révélées dernièrement ne relèvent pas tellement de la bonne gouvernance mais de la simple bonne gestion et de l’application régulière du cadre juridique. Ce constat fait peur car appliquer de nouvelles règles de gouvernance n’y changera absolument rien.
Le débat sur la gouvernance était nécessaire mais il ne faudrait pas qu’il se prolonge. Chaque minute de débat sur la gouvernance est une minute où on ne parle pas des vrais enjeux et de la Belgique qu’on laissera à nos enfants. S’il venait à se prolonger, on en viendrait logiquement à se demander si ce débat sur la gouvernance n’existe pas finalement juste pour masquer un manque de compétence et une absence de vision sur des enjeux plus larges …