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Pas de start-up nation sans stock-options !

L’écosystème entrepreneurial belge évolue dans un cadre juridique encore peu favorable à la prise de risques. Le temps est venu de moderniser le régime archaïque des stock options. Inspirons-nous pour cela des récents efforts de nos pays voisins.

L'entreprenariat, un rêve menacé?

Face aux incertitudes d’une conjoncture économique difficile, travailler dans une start-up fait moins rêver qu'auparavant. Des études récentes montrent en effet que les jeunes diplômés délaissent les projets entreprenariaux au profit des emplois à col blanc. Ceci à rebours de la tendance du “Great Resignation” observée lors du confinement, voyant de nombreux cadres abandonner la sécurité de l’emploi pour chercher l’aventure.

En Belgique, la prise de risque associée à la décision de s’engager dans une start-up ou scale-up n’est pas suffisamment encouragée par rapport à la moyenne européenne. Parmi les obstacles à un écosystème plus attractif, le régime actuel de taxation des plans d’actionnariat salarié (désignés par leur acronyme anglais ESOP), dont la logique et les lourdeurs en dissuadent l’utilisation.

L’employé-actionnaire, une combinaison vertueuse

Mécanisme financier de tradition anglo-saxonne, les options d’achat sur actions sont fréquemment utilisées par les start-ups et scale-ups pour recruter les talents essentiels à leur développement en dépit de ressources a priori limitées.

En complément d’un salaire souvent inférieur au marché, certains employés se voient offrir le droit d'acheter des actions de la société à un prix fixé à l’avance. Les employés bénéficiaires peuvent ainsi espérer, en cas de succès de l’entreprise, partager une partie de la valeur créée.

Les actions souscrites peuvent par ailleurs être associées à des droits de gouvernance, permettant une implication accrue des employés dans la prise de décision. Le mécanisme des options joue donc un rôle clé dans la rétention du personnel qualifié et favorise un modèle de capitalisme plus horizontal.

Une taxation dissuasive et une administration lourde

Le traitement fiscal des plans ESOP, ancré dans une loi de 1999, est relativement simple. Le paiement de l’impôt, calculé sur base de la valeur actuelle des actions, peut s’exercer, au choix, au moment de l’octroi des options (à un taux favorable) ou à l’exercice (cette fois aux conditions standard).

Dans les deux cas, la taxation interviendra indépendamment de la réalisation d’un gain effectif par l’employé. En pratique, ce mécanisme est de nature à dissuader bon nombre d’employés d’accepter les options proposées. L’employé doit en effet choisir de payer des impôts sans savoir s’il pourra un jour vendre ses actions et à quel prix. Cela génère des questions, du stress et l'avance de liquidités qui peuvent être importantes si la valeur de l’action était élevée au départ. Dans ce contexte, il n’est pas rare que des employés refusent tout simplement l’offre qui leur est formulée.

Pour la société, mettre en en place un plan d’ESOP représente par ailleurs des frais juridiques, d’auditeurs et de comptables ainsi qu’une charge administrative non négligeables. Ces contraintes sont décalées avec les priorités et les moyens d’une société qui lance son activité. Un nombre croissant de start-ups hésite dès lors aujourd’hui à mettre un plan en place, ou repousse la décision dans le temps.

S’inspirer du changement

Au vu de ce qui précède, c’est sans surprise que la Belgique se retrouve récemment classée par le fonds de capital-risque Index Ventures en dernière position, parmi 24 pays, pour l'attractivité de son régime de stock options. En haut du classement, les pays baltes, où un régime innovant en la matière a contribué, en une dizaine d'années, à l'émergence d’un des écosystèmes entrepreneuriaux les plus dynamiques d'Europe. On y voit notamment que les formalités en matière de stock options sont relativement simples et que l’imposition s’effectue à la revente. Plusieurs pays européens, comme la France, les Pays-Bas et l’Espagne ont initié des réformes allant dans ce sens.

En Belgique, la réforme fiscale entamée cette année prévoyait au contraire un tour de vis supplémentaire sur les stock options. Son report ne serait-il pas propice à plancher sur un modèle plus cohérent? Ajouter la possibilité d’une imposition au moment de la réalisation d’un bénéfice effectif, c'est-à-dire après la vente des actions, simplifierait le processus et serait une réelle avancée. On peut par ailleurs gager que les caisses de l’Etat ont tout à gagner d’une utilisation plus répandue des plans ESOP.