Pexels blue bird 7210754

L’Europe doit intensifier la lutte contre le commerce illégal de chiens

Chaque année, des centaines de milliers de chiens font l’objet d’un commerce illégal dans l’Union européenne. Grâce au marché unique européen, les réseaux criminels ont le champ libre. Lorsque la Belgique prendra la présidence du Conseil de l’UE en 2024, l’occasion se présentera de s’attaquer à ces pratiques.

De nos jours, presque tous les biens de consommation sont disponibles instantanément, d’un simple clic de souris. On pourrait penser que l’achat d’un animal de compagnie ne répond pas à ce schéma. En effet, les listes d’attente chez les éleveurs de chiens belges agréés peuvent atteindre 12 à 24 mois. Ces élevages doivent respecter une législation belge très stricte. Ils ne peuvent ainsi avoir qu’un nombre limité de portées par an et doivent veiller à la santé aussi bien de la mère que des petits.

En raison de cette rareté, l’offre et la demande ne sont pas en équilibre, surtout lorsqu’il s’agit de races à la mode comme les labradoodles. Nombreux sont ceux qui frémissent à l’idée de devoir patienter pour acquérir le chien de leur rêve et se mettent donc à chercher sur Internet. Les premiers résultats de recherche donnent souvent des photos attendrissantes de chiots que l’on peut aller chercher le jour même dans des chenils portant des noms enchanteurs tels que « Dog Happiness ». En outre, les prix pratiqués par ces grossistes sont en moyenne 75 % moins élevés que ceux pratiqués par les petits éleveurs. Le choix est donc rapidement fait pour beaucoup.

Des usines à chiots

Toutefois, de sombres pratiques se cachent derrière cette offre. Les chenils qui peuvent proposer des animaux de toutes les races à tout moment de l’année les importent souvent d’usines à chiots d’Europe de l’Est. La plupart des mères qui se trouvent là-bas sont enfermées dans de petites cages jusqu’à ce qu’elles soient trop âgées pour produire des chiots. Aucune attention n’est accordée aux maladies génétiques, aux vaccinations et à la socialisation. Ces pratiques donnent des chiots gravement malades et qui présentent souvent des problèmes de comportement.

Année après année, un grand nombre de chiens sont importés en masse d’Europe de l’Est. Dans des pays comme la République tchèque et la Hongrie, les chiots sont élevés dans des conditions épouvantables, puis transportés en Belgique à un âge précoce et sans les vaccins appropriés. De nombreux jeunes animaux ne survivent pas à ce voyage. En raison de la libre circulation des marchandises en Europe, ces organisations néfastes ont les mains libres. Les marges bénéficiaires sont souvent plus élevées que dans le commerce de la cocaïne.

En l’absence d’un cadre réglementaire européen, le ministre flamand du bien-être animal, Ben Weyts, a lui-même pris l’initiative de négocier un accord bilatéral avec la Hongrie. L’accord garantirait une gestion de la vaccination et du stress, de même qu’une traçabilité et un transport des chiots plus qualitatifs. Des accords avec d’autres pays d’Europe de l’Est sont actuellement en préparation.

Il est regrettable que l’Europe soit à la traîne dans ce domaine. Depuis des années, on parle de la nécessité d’harmoniser les normes européennes applicables aux éleveurs et de créer une base de données européenne centralisée dans laquelle les animaux de compagnie munis d’une puce pourraient être enregistrés. Le Parlement européen a tenté à plusieurs reprises ces dernières années d’amener la Commission européenne à prendre des mesures législatives, sans succès.

Le nouveau règlement sur la santé animale, entré en vigueur en avril 2021, apporte quelques réponses à cette problématique. L’enregistrement obligatoire des vendeurs, éleveurs, transporteurs et centres de collecte de chiens et de chats auprès des différentes autorités nationales constitue ainsi une première étape importante. Toutefois, cela ne suffira à démanteler les réseaux criminels.

Momentum 2024

Lorsque la Belgique prendra la présidence du Conseil de l’Union européenne en 2024, elle pourra donner la priorité à certains dossiers. Ce sera l’occasion d’évaluer le nouveau règlement sur la santé animale et formuler des recommandations à l’intention de la Commission européenne. Dans ce contexte, les accords entre la Flandre et la Hongrie pourront servir d’exemple de meilleure pratique pour les autres États membres. Avec, à l’horizon, l’objectif ultime d’une harmonisation plus poussée des règles relatives au bien-être des animaux.

La législation n’est toutefois pas une panacée. En tant que société, nous devons cesser de considérer nos amis à quatre pattes comme des marchandises que l’on peut ramener à la maison en un clin d’œil. La patience est une belle vertu.

Cet article est publié sur L'Echo.be le 19/8/2022