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« Les Régions urbaines apportent une solution viable à l'ingouvernabilité belge. »

Bienvenue en Belgique en l’an 2019. Nous avons six gouvernements, six parlements et un nombre incroyable de niveaux de pouvoir. Notre capitale se compose de 19 communes, six zones de police et plus de 1000 politiciens (source). Nous avons tellement fragmenté notre espace et notre gouvernance que, selon Eurostat (source), seulement 1 % de la Flandre est encore rurale et 900 pages sont nécessaires pour décrire notre système fédéral (source). Bienvenue en Belgique où tout le monde est compétent, mais où personne n’est responsable.

Ne pourrait-on pas faire plus simple ? Sur quelle base pouvez-vous organiser un pays comme la Belgique pour relever les défis d'aujourd'hui et de demain ? Selon nous, la réponse se trouve dans les Régions urbaines. Dans toute l’Europe, des villes prospères appliquent le concept de Régions urbaines et la plupart des partis belges y sont eux-mêmes favorables (source). Mais qu'est-ce donc qu'une Région urbaine ?

Une Région urbaine est un niveau de pouvoir autonome composé d'une ville centrale et du territoire environnant. C'est une zone dans laquelle se déroulent la plupart de nos activités quotidiennes et de nos déplacements. Prenez les trajets domicile-travail par exemple, ou encore le club de sport ou les courses. Depuis la nuit des temps, quels que soient son pays ou sa culture, l’être humain se déplace environ une heure et demie par jour (source). Les carrefours de ces déplacements ont progressivement acquis le statut de « villes ». Celles-ci sont apparues à environ 25 km l'une de l'autre en raison de la distance qu'un commerçant médiéval pouvait parcourir en un jour. Ce sont donc les piliers de notre culture, de notre économie et de notre mobilité, inextricablement liés à leur région. Il est ainsi possible de diviser toute la Belgique en une série de Régions urbaines (source).

Mais pourquoi ferions-nous cela ? Eh bien, parce que ce niveau est assez proche du citoyen, et dispose en même temps du pouvoir et de l’expertise suffisants pour relever les défis liés à la mobilité, à l'économie et au logement. En témoigne par exemple le succès de Fribourg, qui a misé très rapidement sur un réseau de transports publics axé sur la ville comme épine dorsale du développement du logement dans les communes environnantes. Résultat : des zones pratiquement sans voitures comme Vauban, une économie locale plus forte et une réduction de près de 50 % des émissions de CO2 (source).

Autre exemple : les cantons suisses. Ceux-ci sont aussi grands que nos Régions urbaines et disposent de toutes les compétences nécessaires pour saisir les opportunités et relever les défis régionaux. Il n'est donc pas surprenant que trois villes suisses se classent au top 10 mondial en matière de qualité de vie (source) et que ce pays ait été l’économie la plus compétitive au monde l’année dernière (source).

En Belgique aussi, un certain nombre de versions ‘light’ de Régions urbaines ont été créées au cours des 30 dernières années grâce à des fusions ou des intercommunales. L'impulsion vient généralement des questions de mobilité ou de distribution d'énergie, mais les thèmes du logement ou de l'aménagement du territoire sont ensuite eux aussi gérés en commun. Prenez par exemple l’intercommunale Leiedal de Courtrai, le Réseau express régional bruxellois ou encore la Région urbaine de Turnhout. Grâce à des projets locaux largement soutenus et à une politique de réaction rapide, cette dernière reste proche de ses habitants (source). Ainsi, la Région urbaine lutte contre l'isolement social des personnes âgées en déterminant l'emplacement des maisons de retraite au niveau régionalet encourage le commerce local en interdisant les nouveaux supermarchés.

En un mot, les Régions urbaines apportent une solution viable à l'ingouvernabilité belge. Mais quelles en seront les conséquences ? Est-ce à dire qu'il faut réformer les Régions, les Communautés et les Provinces actuelles ? Avec le temps, oui, mais c'est un processus graduel. Les Régions urbaines peuvent prendre la place des Provinces, tout en conservant une partie de l'infrastructure de gouvernance provinciale, déjà située dans les villes centrales. Ensuite, les compétences régionales seraient également transférées pour qu’en fin de compte, nous n'ayons plus que trois niveaux de pouvoir : national, régional urbain et municipal. Chacun avec des responsabilités adaptées à ses défis.

Espérons que d'ici 2050, la Belgique ne soit plus le pays qu’elle était en 2019. Mais un pays où nos villes disposent de suffisamment de leviers pour maîtriser leur crise du logement comme l'a fait Vienne grâce au logement social. Un pays où, comme aux Pays-Bas, un réseau de transport public performant constitue l'épine dorsale du développement territorial. Des territoires où il existe une gouvernance pragmatique et réellement démocratique sur base de la chaîne courte, comme dans les cantons suisses. Un pays doté de centres-villes attrayants comme Copenhague ou Zurich. Et surtout, un pays où l’on fait plus avec moins en collaborant à la bonne échelle.

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