La voie de Fonds des communes plus équitables passe par la frontière linguistique
Les élections communales approchant, le financement des administrations locales refait débat. Les deux grandes Régions du pays peuvent apprendre l'une de l'autre.
Les quelque 300 villes et communes flamandes reçoivent ensemble environ 5 milliards d’euros par an via le Fonds flamand des communes (pour un peu plus de 3 milliards d'euros) et d'autres flux de financement plus modestes. Combinés aux recettes des taxes locales, ces moyens permettent aux communes de financer leurs propres politiques, comme l'infrastructure sportive locale et les activités du CPAS.
Cependant, la cagnotte des subventions flamandes pour les administrations locales est inégalement répartie. Des grandes villes comme Anvers et Gand reçoivent trois fois plus par habitant (!) que la moyenne flamande. Lors des négociations gouvernementales, le CD&V plaide pour une révision du financement des administrations locales, avec une attention particulière aux petites communes rurales.
Les défis spécifiques des grandes villes ne justifient pas qu’Anvers et Gand reçoivent ensemble autant de ressources que 240 autres administrations locales flamandes réunies.
Pourtant, il n'y a rien de mal en soi à ce que les grandes villes reçoivent proportionnellement plus d'argent par habitant que les petites communes. En effet, en plus des postes de coûts classiques que partagent les petites et grandes administrations locales, les grandes villes sont confrontées à des défis particuliers nécessitant un financement supplémentaire, tels que l'accueil des sans-abris ou des réfugiés, et la lutte contre la criminalité liée à la drogue.
Ces défis supplémentaires méritent des fonds supplémentaires, mais ils ne justifient pas qu’Anvers et Gand reçoivent ensemble autant de ressources que 240 autres administrations locales flamandes réunies.
Un marchandage politique, sans critères objectifs
Ce manque de justification n'est pas un défaut du Fonds flamand des communes actuel, mais en est justement une caractéristique. En raison du besoin urgent de liquidités de certaines villes flamandes en 2002, pas moins de 40% du Fonds des communes est distribué sur la base de prélèvements, dans lesquels d'énormes sommes sont allouées aux villes centres, aux villes de province et à certaines communes côtières.
Les administrations locales reçoivent chaque année le même montant, quelle que soit l’évolution des besoins et des défis.
Ces montants alloués nominativement sont le résultat d’un simple marchandage politique, sans critères objectifs appliqués. Ce marchandage remonte à 2002, où des données de la fin du siècle dernier ont été prises en compte (plus ou moins).
La Cour constitutionnelle a déjà averti en 2018 que la Région flamande ferait mieux de baser une future répartition financière sur des données plus récentes afin d'éviter toute discrimination entre différentes administrations locales. La Cour des comptes a également jugé plus tôt cette année que les bases de ce canal de subvention manquent ou sont au moins dépassées.
Plusieurs flux de subventions
Comme les montants par administration locale sont figés, cette répartition est également peu dynamique. Les administrations locales reçoivent chaque année le même montant, quelle que soit l’évolution des besoins et des défis. Si les besoins changent, le gouvernement flamand doit alors ouvrir un nouveau flux de subventions, qui prévoit un financement ad hoc pour un nombre limité de communes qui, en raison de certaines circonstances, sont en manque d’argent. Et ainsi, la Flandre organise son propre enchevêtrement de flux de subventions.
Une étude universitaire récente, commandée par le gouvernement flamand, montre que la suppression des prélèvements et la distribution du budget libéré sur la base de paramètres objectifs, tels que la capacité fiscale et les espaces ouverts, génèrent le plus de gagnants et une répartition plus équitable des ressources.
Une telle réforme entraînerait, dans la plupart des scénarios, une baisse des fonds pour Gand et Anvers, mais en misant sur certains indicateurs de besoins, cet impact pourrait être limité et leurs ressources augmenteraient si les besoins locaux le nécessitent.
Les besoins des grandes villes comme Liège et Namur sont financés de manière plus dynamique et objective que dans le Fonds flamand des communes.
S'inspirer de la Wallonie
À ce stade, la Flandre peut apprendre de la Wallonie. Dans le Fonds des communes wallon, seulement 4,5% sont distribués via des prélèvements, notamment une subvention fixe pour les chefs-lieux de province et d’arrondissement. Plus de la moitié de l'enveloppe est distribuée selon le critère des effets externes, destiné à compenser les coûts que les administrations locales supportent en raison des services rendus à un nombre de personnes supérieur à celui de leurs habitants.
Ainsi, les besoins des grandes villes comme Liège et Namur sont financés de manière plus dynamique et objective que dans le Fonds flamand des communes.
Mais le Fonds wallon des communes est loin d’être parfait: le calcul de ces coûts externes prend en compte les impôts locaux prélevés par les administrations locales. Plus les impôts locaux sont élevés, plus la subvention que la commune reçoit de la région wallonne est élevée. Cela peut inciter à une surenchère des impôts locaux.
En outre, le Fonds des communes wallon, contrairement à son homologue flamand, ne tient pas directement compte des caractéristiques socio-économiques des administrations locales, ce qui peut, par exemple, faire abstraction d’une plus grande proportion de revenus d’intégration à payer dans certaines communes.
Ainsi, les Fonds communaux régionaux sont un domaine où le fédéralisme belge peut démontrer l'une de ses forces: les entités fédérées peuvent apprendre de la politique des autres et échanger des bonnes pratiques. Le chemin vers des Fonds des communes plus équitables et plus objectifs passe donc par la frontière linguistique.